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Les mycoses à répétition : il faut en parler !

  • Photo du rédacteur: Lauriane Strauss
    Lauriane Strauss
  • 10 sept.
  • 8 min de lecture

Dernière mise à jour : 11 sept.

On estime que 75% des femmes seront touchées au moins une fois au cours de leur vie par un épisode de mycose vulvo-vaginale, soit 3 femmes sur 4. Puis, environ 40 à 50% connaîtront au moins deux épisodes. Finalement, 8% de femmes seraient concernées par des mycoses à répétition, soit environ 1 femme sur 12. Il est grandement temps d'en parler.


Une mycose vulvo-vaginale, c'est quoi ?


Une mycose est une infection causée par des levures. Le plus souvent, c'est le Candida albicans qui est en cause (90% des cas), bien que d'autres levures puissent entrer en considération. On emploie alors parfois aussi le terme "candidoses vulvo-vaginales".


Ces levures font partie de la flore ordinaire du vagin, mais cela devient problématique si elles prennent le dessus, compromettant ainsi l'équilibre de la flore.


Elle peut causer les symptômes suivants :

  • Des démangeaisons vulvaires et/ou vaginales intenses (prurit)

  • Pertes inhabituelles blanches épaisses, grumeleuses (type lait caillé). En revanche, elles sont inodores (pas d'odeur caractéristique).

  • Des gonflements / rougeurs vulvaires

  • Sensation d'irritation

  • Brûlures en urinant

  • Parfois des dyspareunies (douleurs pendant/après les rapports)


Il n'y a pas besoin de cocher tous les symptômes, cela peut varier d'une personne à une autre ! Certains peuvent ressembler à ceux d'autres infections, c'est pourquoi il est important de confirmer le diagnostic par un prélèvement et d'éviter l'auto-médication qui peut être délétère.


Le traitement consiste en la prise d'antifongiques oraux et/ou locaux, en fonction de la localisation, des préférences de la personne concernée, de la sévérité des symptômes et d'éventuelles rechutes, ainsi que la situation de la personne (grossesse par exemple).



Les mycoses à répétition, c'est quoi ?


Elles sont caractérisées comme récidivantes à partir de quatre épisodes par année.


Elles peuvent être le début d'une longue errance médicale... car on ne comprend pas pourquoi elles récidivent, ni ce qu'on peut y faire.



Pourquoi ça récidive : quelques hypothèses


Facteurs comportementaux


Les récidives peuvent être causées (totalement ou en partie) par des habitudes de vie et d'hygiène inadaptées. Par exemple la pratique de douches vaginales, l'usage de produits agressifs (savons, déos intimes,...), etc. Nous établirons une check-list à la fin de cet article.


Je vous conseille de vous référer à un.e naturopathe pour une action de fond : revoir le régime alimentaire (une alimentation riche en sucre, ou encore en alcool pourrait favoriser le risque). Vous pourrez aussi être conseillé sur ce qui peut soutenir votre microbiote et système immunitaire.


Résistance fongique


1) La résistance aux antifongiques comme le fluconazole : leur utilisation répétée peut mener à une résistance, ils sont alors moins efficaces sur le Candida albicans.


2) La création d'un biofilm : les levures se collent à une structure, par exemple les muqueuses ou un objet étranger comme un stérilet, et forment une "bulle protectrice" (le biofilm). Elles sont ainsi mieux protégées des antifongiques.


3) Pénétration dans les cellules de l'épithélium vaginal (fine couche tapissant le vagin) : Candida se cache alors et échappe à l'action des antifongiques... Ce qui lui permet de revenir après le traitement. En bref, une même souche installée dans les couches profondes de la muqueuse vaginale réapparaît.


Le Candida albicans a mis au point d'autres stratégies qui le rendent résistant aux traitements, que nous ne traiterons pas ici en détails. Ce qu'il faut retenir c'est que ces levures s'adaptent !


Ces possibilités sont importantes à prendre en considération afin de viser des traitements efficaces, qui peuvent différer de ceux proposés pour un épisode unique et sans suspicion de biofilm ou autre stratégie de survie du Candida.


Déséquilibre du microbiote


Un microbiote intestinal ou vaginal déséquilibré peut être plus vulnérable à la prolifération de Candida, car la flore peut contenir moins de lactobacilles - bonnes bactéries participant à la protection de la zone -


En particulier, prêtez-y attention si vous suivez des traitements antibiotiques, bien connus pour déstabiliser la flore. Il est très intéressant de relever que leur ingestion pourrait provenir aussi de notre alimentation, car les antibiotiques sont largement utilisés dans l'élevage moderne.


Il faut alors comprendre que les récidives pourraient persister malgré un traitement antifongique efficace si la flore protectrice n'est pas restaurée.


Facteurs hormonaux


Des épisodes de mycose peuvent être remarqués lors de certains moments de la grossesse, lors de la prise de certains contraceptifs oraux œstroprogestatifs, ou encore de traitements hormonaux substitutifs.

Si on remarque que ces récidives sont liées à un changement de contraceptif, cela peut valoir la peine de s’intéresser à la question.


Les hormones peuvent aussi induire un changement au niveau du pH vaginal, susceptible d'expliquer une vulnérabilité plus grande (car le pH acide du vagin assure un rôle protecteur).


Défenses locales affaiblies


Une immunité locale dysfonctionnelle peut être un terrain favorable aux récidives. Il faut y penser en cas de traitement immunodépresseur par exemple. 


La voie immunologique paraît passionnante. Par exemple, dans le cadre du syndrome CMC (Chronic Mucocutaneous Candidiasis) - un défaut immunitaire -, la voie de l'immunité locale qui se charge de l'élimination du Candida est en fait déficiente. C'est une piste pour les personnes qui ont, souvent depuis l'enfance ou l'adolescence, des candidoses à répétition touchant la peau, les muqueuses orales, génitales, les ongles et plis cutanés.



Facteurs médicaux


Il faut toujours penser à exclure d'autres facteurs qui pourraient participer à ces récidives, comme la présence d'un diabète (le sucre favorise la croissance du Candida albicans et altère l’immunité locale) ou de maladies inflammatoires chroniques (qui peuvent affecter le système immunitaire, y compris par les traitements utilisés qui diminuent l’immunité locale).


Femme qui a mal aux parties intimes


On fait quoi en cas de mycoses récidivantes ?


  • Confirmer qu'il s'agit bien de mycoses par un prélèvement pour éviter une médication inadaptée et entraînant un cercle vicieux.

    Attention : si vous n'en êtes pas à votre premier rodéo, un nouveau prélèvement doit être effectué à distance d'un traitement antifongique pour être exact (un mois).


  • Identifier les souches responsables par prélèvement afin de mieux les viser par le traitement. Par exemple, en cas de souches non-albicans, on pourrait se tourner vers d'autres antifongiques.


  • Envisager les pistes non antifongiques, comme les probiotiques pour soutenir et rétablir l'équilibre de la flore (forme orale ou locale), les gels et huiles apaisants (voire suite de l'article), etc.


  • Modifier ses habitudes s'il y en a besoin (voire la check-list ci-dessous)


  • Envisager un traitement antifongique sur une plus longue durée si cela est indiqué, en accord avec un médecin. Tout en prenant soin de chouchouter la flore en parallèle pour éviter d'autres tracas comme les vaginoses ou les vaginites.


Les solutions vont varier en fonction de ce qui influence les mycoses pour vous ; changement de contraception hormonale ou changement d'un stérilet ancien si on le suspecte d'abriter des souches, renforcement de la flore, changement d'habitudes de vie, ...



Est-ce sexuellement transmissible ?


Les mycoses ne sont pas considérées comme des IST (Infections Sexuellement Transmissibles), en partie car on peut tout à fait développer une candidose sans activité sexuelle.


En revanche, Candida albicans peut être transmis entre partenaires à l'occasion de rapports sexuels. Aussi, les rapports peuvent perturber l'équilibre de la flore et faciliter la prolifération de Candida. C'est une piste à suivre lorsqu'il y a des récidives qui semblent corrélées à l'activité sexuelle.



Mes conseils en tant que sexologue


1) Quelques gestes indispensables :

  • Privilégier les sous-vêtements en coton (les matières synthétiques ne sont pas respirantes, favorisant alors l'humidité et la prolifération de bactéries).

  • Dire non aux protège-slips quotidiens

  • Ne pas porter un collant sous un pantalon (macération et irritation)

  • Bannir les douches vaginales

  • Éviter les produits agressifs comme les savons inadaptés, les déos intimes, les lubrifiants avec des compos douteuses, éviter aussi les spermicides qui peuvent perturber la flore

  • Rinçage de la vulve à l'eau claire ou avec un soin lavant adapté

  • Remplacer les gants ou éponges de douche par... vos mains ! Bien moins porteuses de bactéries et moins irritantes

  • Ne pas rester trop longtemps dans un maillot de bain mouillé

  • Dormir sans sous-vêtements si cela est possible


2) Attention aux faux réflexes : on pourrait avoir envie de se laver davantage. Pourtant, les mycoses ne se déclenchent pas parce que vous avez une mauvaise hygiène ! Augmenter les lavages accentuera le déséquilibre, les inconforts et le risque de récidive...


3) Il arrive que l'on déconseille d'utiliser des lubrifiants contenant de la glycérine, qui pourrait favoriser la prolifération des levures, surtout dans un contexte de microbiote déjà déséquilibré. Si vous avez envie de suivre cette piste, je vous recommande le lubrifiant naturel aux algues bio sans glycérine de la marque YesForLov.


4) Pendant les rapports, on fait attention aussi à toutes les règles de base, à savoir avoir les mains propres et aller faire pipi après le rapport.


5) N'hésitez pas à agir sur le confort local, par exemple en appliquant des gels, crèmes ou huiles apaisantes. Je vous recommande Intima Rescue, de la marque Womanology (Code promo VAGIQUOI15 sur la première commande, puis VAGIQUOI10 pour les suivantes), ainsi que le gel hydratant et rééquilibrant de la marque Miyé, enrichi en probiotiques. Cela permettra de calmer l'inflammation et vous aidera également sur des fissures/lésions qui auraient pu se produire et être douloureuses.


6) Pour ne pas empirer l'irritation locale évitez les vêtements serrés et le port de tampons lors des règles (effet buvard).


7) Notez dans un carnet les moments de récidive et leur contexte, vous pourriez y trouver des réponses ! Par exemple, il arrive que certaines personnes aient des récidives récurrentes avant leurs règles, liées à la chute hormonale perturbant la flore.



Et si ce n'était pas des mycoses ?


Si le prélèvement n’indique pas de mycose, interrogez d’autres pistes, comme des vaginites inflammatoires non infectieuses, une allergie au sperme si les symptômes surviennent après des rapports non protégés – les manifestations peuvent beaucoup se ressembler -, ou encore des vulvodynies dans certains cas.


Intéressez-vous aussi à votre flore. Parfois ce n’est pas une mycose mais un déséquilibre rencontré après le traitement d’une première mycose.




Et l'aspect psychologique dans tout ça ?


Nous savons que le stress chronique peut impacter le microbiote ainsi que le système immunitaire, et alors pré-disposer à des récidives. Le yoga, la méditation, la relaxation, etc. pourraient alors être des alliés de taille afin de réduire ces rechutes. Entre autres par la baisse du cortisol (hormone du stress), la réduction de l’inflammation, et le rééquilibrage du système nerveux. 


Nous pouvons voir des mécanismes psychosomatiques chez certaines personnes, par exemple des mycoses récidivantes liées à un évènement marquant (par exemple un IVG, dans un des témoignages recueilli), des violences relationnelles et/ou sexuelles non conscientisées… Si vous pensez qu’une source psychique peut jouer un rôle dans vos symptômes physiques, n’hésitez pas à vous rapprocher d’un.e sexologue.


En résumé...


Si vous souffrez de mycoses à répétition, vous êtes loin d'être seul.es. C'est parfois le parcours du combattant pour être entendu.es et se voir proposer des solutions, j'espère alors que cet article aura pu vous apporter quelques pistes.



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